La préservation des jeux vidéo est un sujet qui suscite de plus en plus d'intérêt dans le monde du développement et des études culturelles. Cependant, le chemin vers une meilleure accessibilité est semé d'embûches, comme l'a récemment démontré la fondation Video Game History Foundation (VGHF), qui a vu sa demande d'exemption au titre du DMCA (Digital Millennium Copyright Act) rejetée par le Bureau américain des droits d'auteur.
Le contexte
En avril dernier, la VGHF, accompagnée de représentants du projet Rhizome et du Software Preservation Network, a plaidé en faveur d'une exemption qui aurait permis aux chercheurs d'accéder à distance aux jeux vidéo hors commerce dans les bibliothèques et archives. Cette initiative vise à préserver et à étudier des œuvres qui, autrement, seraient perdues à jamais.
Les acteurs en présence
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Pour l'exemption :
- Video Game History Foundation
- Rhizome
- Software Preservation Network
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Contre l'exemption :
- Entertainment Software Association (ESA)
- American Association of Copyright (AAC)
Steve Englund, représentant légal de l'ESA, a exprimé ses inquiétudes concernant la création d'un "arcade en ligne infernal", une vision dystopique qui, selon lui, découlerait de l'octroi de cette exemption.
La décision du Bureau des droits d'auteur
Le 25 octobre 2024, le Bureau des droits d'auteur a officiellement rejeté la demande d'exemption de la VGHF. Dans un communiqué, la fondation a exprimé sa déception, mais également sa détermination à poursuivre sa lutte pour la préservation des jeux vidéo.
"Bien que nous soyons déçus par la décision du Bureau des droits d'auteur, nous n'avons aucun regret d'avoir traversé ce processus," a déclaré la VGHF. "Au cours des trois dernières années, le travail sur cette pétition nous a permis de générer des recherches importantes, notamment notre rapport sur le marché des rééditions de jeux vidéo aux États-Unis, qui a prouvé qu'environ 87 % des jeux vidéo publiés aux États-Unis avant 2010 restent hors commerce."
Les enjeux de la préservation
La position rigide de l'industrie du jeu, comme le souligne la VGHF, pousse les chercheurs à explorer des méthodes extra-légales pour accéder à une majorité de jeux vidéo qui ne sont plus disponibles à la vente. Ce constat soulève des questions cruciales sur l'avenir de la préservation des jeux vidéo et sur la manière dont les droits d'auteur peuvent entraver l'accès à la culture numérique.
Pourquoi la préservation est-elle importante ?
- Conservation de l'histoire vidéoludique : Les jeux vidéo font partie intégrante de notre culture moderne. Leur préservation est essentielle pour comprendre l'évolution des médias et des technologies.
- Accès à la recherche : Les chercheurs ont besoin d'accéder à ces œuvres pour étudier leur impact et leur héritage.
- Éducation : Les jeux vidéo peuvent servir d'outils pédagogiques, permettant aux étudiants d'explorer des thèmes variés à travers des expériences interactives.
L'appel à l'action
La VGHF ne compte pas abandonner. Dans ses déclarations, elle a affirmé qu'elle poursuivrait son plaidoyer pour un meilleur accès et des dispositions légales qui facilitent la préservation des jeux vidéo.
"Nous ne sommes pas encore prêts à abandonner. Nous continuerons à plaider pour un meilleur accès et des exemptions légales pour la préservation des jeux vidéo et à travailler avec les membres de l'industrie du jeu pour accroître la sensibilisation interne à ces questions," a déclaré la VGHF.
Les prochaines étapes
Dans les mois à venir, la VGHF prévoit de :
- Renforcer ses recherches : Continuer à produire des études et des rapports sur l'état de la préservation des jeux vidéo.
- Mobiliser le soutien : Travailler avec d'autres organisations et chercheurs pour créer un mouvement en faveur de la préservation.
- Sensibiliser l'industrie : Engager des discussions avec les développeurs et les éditeurs pour les sensibiliser à l'importance de la préservation.
La voix des acteurs de l'industrie
Warren Spector, un vétéran de l'industrie, a également exprimé son soutien à la cause de la préservation. Il a partagé son expérience personnelle sur la manière dont il a "littéralement fouillé dans les poubelles" pour récupérer des éléments de jeu afin de contribuer à la préservation. Ce témoignage témoigne de la passion et de l'engagement de nombreux professionnels du secteur pour protéger l'héritage vidéoludique.
La lutte pour la préservation numérique
La VGHF souligne que, dans le contexte actuel, il pourrait être nécessaire de "redécouvrir" la piraterie, non pas en tant qu'acte illégal, mais comme un outil d'accès à des œuvres qui, autrement, seraient perdues.
"Nous pourrions revenir à une époque où la piraterie est quelque chose dont nous devons être instruits pour accéder aux choses que nous aimons," a déclaré Frank Cifaldi de la VGHF. "Le streaming numérique a tout englouti et nous avons tous été contents de cela. Nous voyons déjà des choses disparaître de notre vue."
Les défis à venir
La question de la préservation des jeux vidéo est plus pertinente que jamais. Avec l'évolution rapide des technologies et la transition vers le numérique, de nombreux jeux risquent d'être perdus à jamais. Les entreprises doivent prendre conscience de l'importance de préserver leurs anciens titres et de faciliter l'accès aux chercheurs et aux passionnés.
Quelques défis auxquels la VGHF est confrontée :
- Ressources limitées : La VGHF doit continuer à trouver des financements pour ses projets de recherche et de préservation.
- Résistance de l'industrie : Les réticences des entreprises à partager leurs anciens titres peuvent entraver les efforts de préservation.
- Changements technologiques : La rapidité avec laquelle les technologies évoluent peut rendre certains jeux obsolètes et difficiles à préserver.
Conclusion
La lutte pour la préservation des jeux vidéo est loin d'être terminée. La VGHF, armée de sa détermination et de son engagement, continue de se battre pour un avenir où les jeux vidéo sont accessibles à tous. Les passionnés de jeux vidéo et les chercheurs doivent s'unir pour faire entendre leur voix et garantir que l'histoire vidéoludique soit préservée pour les générations futures.
Il est crucial que l'industrie prenne conscience de ces enjeux et qu'elle collabore avec les organisations de préservation pour garantir que les jeux vidéo, qui sont non seulement des produits de divertissement, mais aussi des œuvres d'art et des témoins de notre culture, soient protégés et accessibles. La route est encore longue, mais avec le soutien de la communauté et la persévérance de la VGHF, l'espoir d'un avenir meilleur pour la préservation des jeux vidéo demeure.